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Wantili – Lieu de la Création - Canning Stock Route – puit n°25

Peinture magistrale de l’artiste Bugai Whyoulter. Format : 125 x 300 cm. Titre : Wantili. Acrylic on linen. Ref : 19-1111. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artists and Martumili Art.

Peinture magistrale de l’artiste Bugai Whyoulter. Format : 125 x 300 cm. Titre : Wantili. Acrylic on linen. Ref : 19-1111. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin Gallery with the courtesy of the artists and Martumili Art.

En 2002 après plus de 20 ans de lutte, les Aborigènes Martu ont récupéré un des territoires les plus vastes d’Australie dans le cadre du Native Act Title.
Avant les années 60 beaucoup d’entre eux n’avaient pas rencontré d’occidentaux.
Les premiers contacts, tel un choc de deux civilisations, débutèrent avec l’établissement entre 1901 et 1907 d’une barrière de 3200 km à travers le pays Martu pour éviter la dissémination des lapins. Puis entre 1906 et 1907 avec la création de la Canning Stock Route pour acheminer des bovins à travers le désert. Plus grande route de transhumance au monde sur 1800 km, elle provoqua des actes brutaux contre les Aborigènes, afin qu’ils révèlent les emplacements des trous d’eau sacrés pour abreuver les troupeaux.

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Aux confins de plusieurs déserts, leur territoire éloigné offre des paysages à couper le souffle, où alternent d’élégantes dunes de sable rouge et d’anciens épanchements d’eau et lacs salés poudrés de blanc nacré.
A l’ouest de leur territoire, au niveau de la Canning Stock Route, d’anciennes rivières des temps géologiques se réveillent en fonction des saisons et serpentent entre les dunes du désert dans un contraste surprenant.

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Ces lieux habités depuis plus de 40 000 ans par les Aborigènes d’Australie portent en eux les histoires du Tjukurpa et de la Création.
Le lieu particulier de Wantili près du puit numéro 25 de la Canning Stock Route, résonne à Bruxelles avec 10 œuvres de 4 artistes qui l’évoquent et le célèbrent dans leurs toiles. Deux œuvres magistrales de trois mètres des peintres Ngamaru Bidu (1949) et Bugai Whyoulter (1939) soulignent avec des individualités tout à fait contrastées leurs liens claniques à ce lieu et l’histoire du Temps du Rêve dont elles sont les gardiennes tutélaires.

Œuvre magistrale de l’artiste Ngamaru Bidu. Titre : Wantili. Format : 125 x 300 cm, Acrylic on linen. Ref : 19-953.. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery with the courtesy of the artists and Martumili Art. Cette peinture proposée à Bruxe…

Œuvre magistrale de l’artiste Ngamaru Bidu. Titre : Wantili. Format : 125 x 300 cm, Acrylic on linen. Ref : 19-953.. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery with the courtesy of the artists and Martumili Art. Cette peinture proposée à Bruxelles fut finaliste du John Stringer Art Prize 2019, et exposée dans ce cadre à la prestigieuse John Curtin Gallery de l’université éponyme de la ville de Perth. Plus d’informations sur ces peintures d’art Aborigène.

Les deux artistes évoquent avec leurs styles graphiques différents et leurs émotions propres, l’histoire essentielle des 7 sœurs, grands ancêtres qui traversent ces lieux de Wantili (puit n° 25), en direction de Tiwa (puit n°26), puis vers le lieux clefs de Juntujuntu (puit n°30)… En ces temps immémoriaux, nous sommes aux origines du monde. Les 7 sœurs inventent le territoire, le marquent de stigmates dans les fissures de la roche, dans la création des trous et épanchements d’eau. Puis elles s’affranchissent des frontières entre Western Australia aujourd’hui et Northern Territory, pour continuer leur dynamique de création autour de Kiwikurra, avant de s’évader dans le ciel et de créer la constellation des Pléiades.

Ces histoires nous connectent à ces lieux sacrés au-delà des océans, célébrés par des cohortes de générations successives à travers les millénaires, dans la même dynamique que l’artiste Bugai et son petit-fils Cyril Whyoulter (1985) qui reprend le flambeau. L’acuité du récit graphique de Cyril se distingue à la galerie du geste énergique et fondu de sa grand-mère Bugai. Chacun avec son langage évoque l’histoire de Wantili, avec son niveau de connaissance et les chemins contrastés des âmes.

Cyril Whyoulter (1985) - Wantili (Well 25) - 152 x 75 cm - ref : 19-200. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery with the courtesy of the artists and Martumili Art.

Cyril Whyoulter (1985) - Wantili (Well 25) - 152 x 75 cm - ref : 19-200. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery with the courtesy of the artists and Martumili Art.

Périple dans l'Australie secrète IV : le Kimberley Australien (2014)

Je passe trois jours dans la communauté et le centre d'art de Warmun. Il m'accueille dans une chambre, dont le bâtiment fut autrefois en 1920 l'unique maison et centre de poste du lieu. Partout sur les murs du salon figurent des œuvres historiques du centre d'art.

Dans l'entrée je reste passionné par les anciennes plaques de métal des pompes à essence de Warmun, peintes par les plus grands artistes dont Lena Nyabi qui est célébrée à travers le globe et à Paris. L’architecte Jean Nouvel a repris son œuvres dans deux endroits magistraux de l’architecture du Musée du Quai Branly Jacques Chirac : la façade en béton rue de l’université et une œuvre d’elle reproduite, sur 700 m2 du tout du musée. La plus grande œuvre d’art de Paris, visible du ciel et de la Tour Eiffel. Un must !

Périple dans l'Australie secrète III : aux frontières du Great Gibson Desert

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Ce matin, après le petit déjeuner autour du feu, la journée n’a pas vraiment bien commencé.

Durant la nuit, un pneu s’est totalement dégonflé. Il est définitivement crevé et pas facilement réparable. Visiblement une pierre a déchiré la structure. Au milieu de nulle part, ce n’est pas une bonne nouvelle.

Je prends la pelle pour retirer les plantes piquantes sous le 4x4 avant de m’y glisser. Incroyable ce que nature est astucieuse pour piquer et s’agripper dans ces régions arides. Il convient de creuser afin de poser une planche en bois sous le cric. L’opération pour soulever ce 4x4 de plusieurs tonnes n’est jamais simple. Après 10 cm d’élévation, il retombe justement sur lui-même. Je recommence... Sous la planche quelques cailloux permettent de la stabiliser. Je creuse également la terre afin de faire de la place pour une des roues de rechange. Heureusement il y en a deux. Qu’elles sont lourdes... Après 1h30 d’efforts je suis enfin prêt à partir et couvert de terre et de poussière rouge.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Dans la communauté de Mantamaru (Jamieson) il y a une messe en plein air. J’observe de loin les femmes chanter de belles mélodies en Pitjantjara. Un homme avenant m’accompagne à la maison du responsable de l’unique magasin du lieu et de la seule pompe à essence enfermée dans une caisse en métal. On est dimanche et je lui demande s’il veut bien ouvrir pour moi afin de faire le plein. Cela me coûtera 20 dollars en plus mais sans carburant je serai bloqué ici.

Il est un peu étonné de me trouver dans ce coin et encore plus quand je lui dis que je remonte vers Newman plus à l’ouest.

La route est magnifique et serpente entre les dunes de sable et les collines de pierre pulvérisées. Venant du ventre de la terre, crachées par d’anciens volcans il y a des millions d’années, elles sont chargées en minéraux et sonnent comme du métal. C’est étrange.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Ici on fait avec les moyens du bord. Sur la route les bornes kilométriques sont d’anciens pots d’échappement élégamment peints avec juste un W pour Warburton et la distance en kilomètres qui reste à parcourir.

Au bord de la route, un 4x4 avec un couple de retraités est à l’arrêt. Je leur demande si tout va bien. Il me propose de prendre un thé ce qui est assez inattendu. Nos deux 4x4 sont de chaque côté de la piste. Nous prenons le thé debout, accoudés à leur véhicule pendant que quelques voitures ralentissent et passent au milieu en nous saluant de toutes leurs mains. Elles sont bien nombreuses avec 8 à 9 personnes qui prennent place doublant ainsi les capacités des constructeurs et sans ceinture...

Pendant une heure nous discutons géographie, sociologie et politique. Ils sont charmants et traversent l’Australie d’Est en Ouest. Je les invite à Bruxelles s’ils passent en Europe.

Un peu plus loin, une famille Aborigène me fait des signes au bord de la route. Ils ont besoin d’aide. Deux de leurs pneus sont creuvés. Ils souhaitent les regonfler. Je ne suis pas certain du résultat mais sors tout de même le compresseur à air que je branche sur la batterie. On occupe toute la route. Opération terminée. Ils s’engouffrent à au moins 10 dans la voiture et s’empressent pour arriver avant que les pneus ne soient à plat à nouveau. Ce n’est pas gagné et cela m’évoque les vidéos assez amusantes sur le « bush mécanique ».

Les nuages couvrent progressivement le ciel. Les contrastes de couleur sont assez magiques. J’espère qu’il ne pleuvra pas. Sur ces routes de terre rouge, cela peut compromettre la circulation pendant plusieurs jours...

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Au détour de la piste je vois les restes d’un chameau. Cette structure osseuse assez remarquable, probablement dévorée ici par quelques dingos sauvages, ne cesse de m’étonner. Sur une terre étrangère aux chameaux avant leur importation en Australie, la merveilleuse ADN a su utiliser les plantes endémiques du coin pour élaborer ces formes pourtant extra territoriale.

Plus loin un autre chameau heurté par un véhicule n’en finit pas de se décomposer. Je ferme les fenêtres. L’odeur est épouvantable.

À côté de la route se trouve une ancienne cattle outstation. Des poteaux rouillés et fils de fer barbelé soulignent notre propension presque insatiable à borner, délimiter, posséder le territoire. Ces notions matérielles sont tellement différentes chez les Aborigènes. Là où nous voyons une propriété privée, eux voient un espace communautaire réservé, partagé, et transmis de générations en générations en respectant l’intégrité de la nature. Là où nous transformons sans fin, eux préservent et célèbrent...

En fin de journée je vois les restes d’une maison en dur. Elle fut construite par un prospecteur minier à la recherche de pierres riches en cuivre. Un tout petit filon juste à côté.

Avec les moyens du bord il a formé des briques crues avec la terre rouge comme on le faisait en Mésopotamie il y a 6000 ans. Sans toit la maison en ruine fond au rythme des pluies comme la défunte tour de Babel que je voyais en 1997 à Babylone en Irak.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Périple dans les déserts Australiens. Eté 2018. © Photo : Aboriginal Signature Estrangin gallery.

Finalement je n’atteindrai pas ma destination souhaitée pour aujourd’hui. Qu’importe. L’idée de tout planifier devient de plus en plus étrangère. Je m’arrête un peu avant que le soleil ne tombe là où un lieu semble propice et accueillant.

Nouveau bivouac proche de Warburton. Le bois est encore plus rare qu’hier. Certaines souches décharnées sont tellement esthétiques que j’hésite à les arracher du sol. Je progresse doucement vers l’ouest. Demain je rentre dans le Gibson désert.

Je monte sur le 4x4 à nouveau pour trouver du réseau. Cela ne passe pas facilement. Je tente à nouveau.